il a fallut que tu partes. enfermés comme des cons parmis les tristes, c'était pas un truc qui nous convenait, sauf que moi je rentrais un peu plus dans le moule, j'étais un peu moins sale gosse, certes. tout le monde part, la vie est faite d'adieu (prononcés ou non). t'es parti seul putain.
putain
putain
PUTAIN.
la vie est difficilement supportable à l'orphelinat, elle l'était un peu plus avec tox. putain c'con là à treize piges il en connaissait un rayon sur les drogues. tox. c'est con comme surnom. tox est une planète inexploré, une petite étoile (filante), il vous glisse entre les doigts. tox on le retient pas (pas même moi) si il a envie de partir il partira
sans vous.

- il n'est pas méchant loin de là.
- mais pourquoi ?
- parce qu'il est-
- pourquoi parles-tu toujours de lui ? pourquoi ne le détestes-tu pas ? pourquoi as-tu gardé tous vos souvenirs ? pourquoi souris-tu encore là ?
- tox est toujours là, tox est toujours là. il reviendra peut-être, ou pas j'en sais rien. mais il est toujours dans ma putain de tête tu comprends ? j'le vois encore. il sourit, il s'fout de vos putains de gueule, il se défonce dans les chiottes des filles, il rit, il gueule, il... bordel vous êtes tous cons. vous ne le connaissez pas tox, toi et tout ces putains de psychiatres à la con. et puis les gens ici non plus ne le connaissent pas. moi même je ne le connais pas. et vous, vous vous connaissez hein ? comment peut-on se connaître ? tox il se connaît pas lui même, j'suis sûre que j'en sais plus sur lui que lui.
tox ne se connaît pas non, et il n'a pas de parents pour lui dire qui il est. un peu comme moi, d'ailleurs. je n'envie pas ceux qui ont a parcours déjà tout tracé, je veux pouvoir décider de ma vie et avoir l'horizon tout entier. mais c'est pas évident de trouver le droit chemin quand on est bancal, tox je ne sais pas ce qu'il est devenu. il est peut-être parti au loin, il vend peut-être de la drogue, ou alors il m'attend ? sauf que sans tox je n'ose pas rêver d'évasion. j'ai peur qu'on voit mes rêves ici et qu'on m'engueule, j'ai peur qu'on m'enferme, j'ai peur de tout. sauf avec tox. j'aimerais lui écrire, lui foutre une dernière gifle, l'engueuler une dernière fois. j'aimerais lui raconter la folie des gens, la dépression des autres, le vent qui crie et qui fait claquer les portes, la pluie qui tape sur les fenêtres, le repas du midi qui est toujours froid, et les soirs quand il n'est pas là. j'aimerais lui dire que je ne dors plus, moins que quand il était là et qu'on faisait des nuits blanches. j'aimerais lui dire que j'ai envie qu'il vienne me chercher pour qu'on aille découvrir le monde ensemble, j'aimerais lui dire que ses bras me manquent et que
mais
on ne sait pas. tox est parti, peut-être à quelques mètres d'ici, peut-être à l'autre bout du monde. j'ai du mal à me faire à l'idée que je ne le reverrai peut-être plus. on a beau dire qu'à mon âge on se fait beaucoup d'amis, ça n'arrange pas les choses. je ne veux pas d'amis je veux le bonheur. et le bonheur, c'est tox.

   

combien tu vends ta liberté,
dis, combien tu vends ta poésie ?

l'enfance est un cocon, une sorte de petit berceau où on te dorlote et te berce, où on te bouscule parfois un peu aussi. puis un beau jour on te sort du berceau et on t'fout au plein milieu de la vie et à partir de ce jour, tu te démerdes.
dans mon cas, je suis sortie du berceau seule, j'ai osé partir. de toute façon tox n'est pas revenu et ne reviendra pas, peut-être même qu'il ma oublié là où il est. seize ans et enfin libre, sans famille cependant. mais je n'ai jamais vécu dans la rue, c'est mon psy qui m'a hébergé. j'ai toujours eu du mal avec les psychiatres mais avec james le courant est plutôt bien passé. vous savez, parfois ça fait juste du bien de faire confiance à quelqu'un quand on a personne, james l'a compris, james m'a comprise.
ce con m'a inscrite à l'université, il dit qu'il faut que je me sociabilise plutôt que de rester toute seule dans mon coin. "les livres ne peuvent pas guérir tous les maux, tu dois te faire des amis mia." vous savez, ce genre de discours débile que vous sortent vos parents, lui c'est son truc.
et moi ça me déplaît pas.
j'veux dire, c'est compliqué et en même temps si simple. prenez pour exemple, tout le monde s'est déjà demandé ce qu'est le bonheur, comment l'atteindre et le garder, sous quelle forme paraît-il, bref. toutes ces questions débiles qui ne servent à rien. pourtant l'autre jour, le bonheur je l'ai trouvé. le bonheur oui, c'était l'autre jour. le bonheur c'était de voir james qui jouait au échecs avec un enfant de l'orphelinat. le bonheur c'était de le voir tricher et rire comme un gamin de six ans. l'autre jour, james avait six ans, et le gosse aussi.

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toxic heart