Deux mois. Deux mois que je pense, j'ai peur, je pleure, je souffre. Deux mois de silence, de fuite. Deux mois que j'ai envie de courir vers toi et te dire tout ce que j'ai sur le coeur. Ce que j'ai sur le coeur c'est toi, c'est nous, c'est ce que je suis quand tu es là. Ce que j'ai sur le coeur c'est aussi cette peur, cette peur de l'inconnu. Oui j'ai peur, voilà. J'ai peur de souffrir, peur de la réaction de ta soeur qui est aussi ma meilleure amie, et j'ai cette question qui me tourmente : et si ça ne fonctionnait pas? si ça nous faisait plus de mal que de bien? Alors voilà, depuis deux mois, j'ai choisi la solution la plus simple : te fuir. Mais le hasard fais parfois des choses qui ne nous arrangent pas vraiment, tu es mon prof de sport pour toute l'année. J'ai la boule au ventre à chaque cours, j'essaie de me cacher derrière les autres élèves, je fuis ton regard, je n'y arrive pas. Je n'arrive pas à te regarder sans pouvoir te montrer l'amour que je ressens, c'est trop dur, je n'en peux plus. Cette situation est trop dure à supporter, mais quelle autre solution avons nous? Malheureusement aucune.
Nous voilà arrivés, ma classe et moi, pour ton cours. Comme toujours, j'essaie de rester plutôt loin de toi et tes yeux. Nous nous asseyons tous autour de toi, le petit rituel dont je me passerais bien car dans cette position tu ne peux que me voir.
« Bonjour à tous, j'espère que vous êtes en forme, au programme aujourd'hui à la demande générale ça sera Hand-ball. Mais pour commencer, trois tour de gymnase et étirement. En avant. » En temps ordinaire j'aurais été très heureuse, le handball étant l'un de mes sports préférés, mais là j'avais la tête ailleurs, rêvant de la fin de ce cours qui devenait parfois un supplice. Du coup, je me levais rapidement et partais faire les tours de gymnase, en espérant que le temps passerait vite.

J'avais encore à l'esprit tous ces moments magiques que l'on a pu partager à vegas, tous ces moments de bonheur indescriptibles. Je rêve parfois d'y retourner pour revivre tout ça, et aussi pourquoi pas pour éviter de se marier, partie que j'aurais aimé éviter pour ne pas être dans cette situation pire qu’embarrassante. Tout ceci serait tellement plus simple si nous ne nous étions pas mariés pendant ce voyage. Nous avons inconsciemment montrer l'amour que nous ressentons l'un pour l'autre depuis notre rencontre. Mais comment savoir si tu m'aimes vraiment ou si tout ceci n'était qu'une erreur. Je suis pleine de doutes, de questions, de peurs.
Je faisais mes tours tout en réfléchissant, sans faire attention à ce qui se passait autour de moi, j'étais totalement dans ma bulle, comme isolée du monde entier. « Une fois vos tours fini, vous ferez des équipes de 5 et vous, vous échaufferez avec le ballon. ». J'allais donc avec mon équipe habituelle, et nous avons commencé à faire l'échauffement avec ballon. Sauf que je suis ultra maladroite, ce n'est pas un scoop, tout le monde le sait, il faut toujours que je me fasse quelque chose, mais là, j'avoue que je ne m'y attendais pas. J'avais la tête ailleurs, je fixais Ben à vrai dire, mais j'avoue ne pas avoir vu le ballon m'arriver en plein dessus, enfin surtout dans la tempe. Je me suis alors sentie tombée, et après c'est le black out total. Voilà pourquoi il faut toujours regarder le ballon, se le prendre en pleine figure est loin d'être agréable.

Le brouillard total, un moment complètement déconnecté du monde réel, comme sur un nuage où l'on ne réfléchit pas, et c'est à ce moment là que mon subconscient fait des siennes. La sensation d'une présence paisible à mes côtés, d'une présente agréable qui me fait me sentir heureuse. Cette présence n'a pour image autre chose que Ben, il ne sort décidément jamais de mes pensées. C'était un rêve plutôt assez agréable, un rêve qui ressemblait assez à la réalité que nous avons vécu tous les deux à vegas. Et tout de suite après cette pensée revient la douleur que je ressent depuis notre retour, ce dur retour à la réalité que j'avais été obligée de faire à ma plus grande tristesse. Je voguais parmi le tas d'émotions que j'ai pu ressentir récemment, de la souffrance à la culpabilité, je revoyais tout, et c'était plus douloureux que le coup sur la tempe que je m'étais pris quelques minutes plus tôt. Peu à peu le brouillard s'estompe, le nuage redescend, c'est un retour à la vie réelle. J'entrouvre les yeux, la lumière me les brûle. Je sens cette présence que je connais très bien, c'est mon Ben. Je n'ai même pas besoin de regarder son visage pour savoir que c'est lui. J'essaie alors de me redresser pour mieux le voir, et lui faire face pour la première fois depuis bien longtemps. J'ai alors serré sa main très fort, et j'ai prononcé ces mots, à la fois soulagée et surprise. « Ben?! ».

A vrai dire j'étais plus soulagée que surprise. Ben est juste adorable, et cela n'avait rien d'étonnant qu'il soit là, à mon chevet dans cet hôpital auquel j'étais plutôt habituée après mes nombreuses visites. Ben c'était le genre d'homme doux comme un agneau, toujours là pour les autres, à penser à eux, c'était une vraie perle, un petit bijou que la vie m'avait apporté mais tout ne s'était pas déroulé comme prévu. Il y avait d'abord eu cette rencontre qui avait tout changé, le moment où des étoiles on commencé à briller dans mes yeux, le moment où j'ai su ce que c'était le coup de foudre, ce sentiment de ne plus contrôler son coeur, de n'écouter que lui, de perdre la raison.
Je serrais sa main très fort comme pour me prouver que tout ceci était bien réel, et c'est lorsque j'entendis sa douce voix que je m'en rendis compte. Il était bien là, à mes côtés, me tenant la main.  « Rose ! Comment tu te sens ? ». Je m'apprêtais à lui répondre, mais lorsqu'il déposa un baiser sur mon front j'eu comme le souffle coupé. J'avais oublié comme c'était agréable. Je réussis finalement à sortir quelques mots, tout en lui effleurant la joue. « Je suis heureuse, juste heureuse Ben. ». Oui j'étais heureuse, c'est tout ce que je pouvais penser. J'occultais de mon esprit toute la souffrance que j'avais pu ressentir ces derniers temps pour juste penser à ce bonheur que j'espérais tant. « Ne me fait plus jamais ça... ». Je ne pus m'empêcher de rire, je le trouvais juste mignon. « Je ne peux rien te promettre Ben, tu sais comme je peux être maladroite, et encore plus quand je pense à autre chose.. ».

C'est peut-être drôle à dire, mais c'est dans les moments d'inconscience, où le cerveaux ne réfléchit plus, que l'on prend conscience des choses que l'on ressent, de ce qui est bien pour nous, ce qui nous manque. Dans mon cas, ce qui me manque c'est Ben, c'est nous ensemble, c'est ce sentiment de sécurité et de bien-être qu'il m'apporte comme à ce moment précis où il est inquiet pour moi. Oui, je le connais assez pour connaître la tête qu'il fait quand il est inquiet, je le connais en quelques sortes par coeur, et surtout je le portes dans mon coeur, c'est lui mon coeur. Je l'aime, c'est tout ce que je peux dire, mais je ne peux le dire à personne, et encore moins à Laurène, et ça c'est une situation horriblement pesante. On s'aime sans pouvoir se le dire, on a envie de se prendre dans les bras sans pouvoir le faire. On est comme prisonniers de cette situation.
Ça faisait du bien de pouvoir lui parler en face à face, sans personne autour. Et comme toujours, il ne pouvait pas s'empêcher de me taquiner, et je ne pouvais pas m'empêcher de le trouver encore et toujours mignon. « Heureuse d'être dans un lit d'hôpital ? ». Je ne pus encore une fois pas m'empêcher de rire. Pourquoi Ben me fait-il toujours cet effet là? « Surtout heureuse que tu sois là, c'est tellement adorable. » Ben avait l'ai aussi soulagé que moi, je me demandais tout de même pourquoi sachant que j'ai eu un black out à cause d'un maudit ballon. « Promet-moi juste d'essayer, j'ai eu tellement peur... ». Sur le coup, je fus plutôt surprise qu'il ai eu peur, mais si ça avait été lui à ma place, j'aurait eu peur aussi. « Je vais essayer, mais encore une fois je ne te promets rien, je suis une habituée de l'hôpital tu sais! ». Je rigolais de ma propre réponse, ce qui est plutôt vrai, je suis abonnée aux passages à l'hôpital. Suite à son baiser sur ma main, mes joues virèrent au rouge tomate, et j'avais la sensation d'être une gamine avec son premier amoureux qui lui faisait son premier baiser, enfin le truc un peu ridicule pour une étudiante de vingt-trois ans quoi. « Ça ne se serait sans doute pas produit si je t'avais pas évité depuis notre retour de Vegas... ». Bim. En plein dans le sujet que j'essayais d'éviter depuis tout ce temps. Le moment que j'ai tant redouté arrivait. Toutes les choses se bousculaient dans ma tête, mes yeux brillaient, remplis de larmes, nostalgique en passant à nous. J'essaya alors de me ressaisir, sans grand succès, mais je pus au moins lui répondre. « Ben, tu n'es pas le seul fautif dans l'histoire, je te fuyais aussi tu sais. J'ai peur, peur de ce qui allait se passer, peur de ce qu'on allait devenir. Des tonnes de questions tournent dans ma tête sans réponse. Comment va réagir Laurène? Est-ce que tout ça, nous, ça va fonctionner? Ne va-t-on pas plus souffrir que dans la situation dans laquelle nous sommes maintenant? ». Pour la première fois, j'avais peur en étant avec lui, mais cette fois-ci j'avais peur de nous. J'avais les larmes aux yeux, ceux-ci plongés dans les siens, ne pouvant m'en décrocher.